Chrétiens, juifs ou musulmans: des millions de prières pour le pape agonisantPARIS (AFP), le 01-04-2005De la Pologne aux Philippines, du Kenya au Pérou, qu'ils soient chrétiens fervents, juifs ou musulmans compatissants, des millions d'hommes et de femmes de tous horizons priaient vendredi pour Jean Paul II, salué pour son courage et son action.
Victime d'un arrêt cardiaque et d'une septicémie, le pape, âgé de 84 ans, a reçu jeudi soir les sacrements du malade. Il est "toujours conscient", selon le Vatican, mais dans un état d'une "gravité évidente".
Dans les grandes villes et les lieux de pèlerinage catholiques, des messes et des prières spéciales sont dites: à New Delhi, Cologne (Allemagne), Paris, Moscou, Bethléem, Bagdad, New York, Sydney, Nairobi, Abidjan... mais aussi à Fatima (Portugal), à Lourdes (France) ou à Czestochowa (sud de la Pologne), où la basilique du monastère de Jasna Gora abrite la célèbre icône de la Vierge noire, vénérée par le pape.
Sur l'île indonésienne de Nias, ravagée lundi par un séisme qui a tué quelque 1.300 personnes, la cathédrale Sainte-Marie de Gunung Sitoli a été transformée en morgue, mais un office spécial aura lieu "pour Sa Sainteté".
Aux Etats-Unis, le porte-parole de la Maison Blanche Scott MacClellan a indiqué que "le président (George W. Bush) et Madame Bush se joignaient à tous ceux qui dans le monde prient pour le Saint-Père" ajoutant que "les manifestations d'amour et de compassion émanant de tant de gens, y compris de millions d'Américains, étaient un témoignage de sa grandeur".
Au Portugal, en Irlande, en Slovaquie, en Croatie, au Brésil, en Argentine ou encore au Pérou, évêques, archevêques et cardinaux ont appelé les fidèles à prier avec ardeur.
Mais sans attendre ces appels, les catholiques ont afflué spontanément par milliers vers les églises dès l'annonce de l'aggravation de la santé du pape, comme en Lituanie, où 75% de la population sont catholiques, ou aux Philippines.
Les religieuses de l'ordre de mère Teresa observaient vendredi des prières "pour le rétablissement" de Jean Paul II.
En Pologne, son pays natal, tout le pays est mobilisé et la tension apparaît si intense que l'Eglise polonaise a demandé aux fidèles de garder leur "calme".
Le Premier ministre Marek Belka a exprimé sa tristesse et sa "douleur" face aux nouvelles de Rome et à son "impuissance" à "aider" et "protéger" l'enfant chéri du pays.
Les habitants de Cracovie, ville dont Karol Wojtyla a été l'archevêque avant d'être pape, se sont massés en foule devant une fenêtre du palais des évêques, où Jean Paul II apparaissait lors de ses pèlerinages. Sa ville natale de Wadowice, dans l'extrême sud, retenait son souffle, dans une tension "incroyable", selon un porte-parole de la mairie.
L'ancien président polonais et Prix Nobel de la Paix, Lech Walesa, a appelé la population "à prier pour que le Bon Dieu garde le Saint-Père sur cette terre, à l'époque de la mondialisation et du chaos".
Les juifs polonais réciteront vendredi soir une prière spéciale au cours du sabbat à la synagogue de Varsovie. "Depuis deux mille ans, personne n'a fait autant que Jean Paul II pour la réconciliation entre les juifs et les catholiques", a souligné le Grand rabbin de Pologne Michael Schudrich.
La prière du vendredi a aussi donné le coup d'envoi de cérémonies spéciales pour le pape dans toutes les mosquées du pays, qui compte quelque 7.000 musulmans, a annoncé le mufti de l'Union religieuse musulmane de Pologne, Tomasz Miskiewicz.
"Toutes nos prières vont vers le pape", a déclaré en France le président du Conseil français du culte musulman (CFCM), Dalil Boubakeur, rendant hommage à "la dimension exceptionnelle de ce serviteur de Dieu" qui a "reçu une grande sympathie de la part des musulmans".
Mehmet Ali Agca, le Turc qui avait tenté d'assassiner Jean Paul II en 1981, priait lui aussi depuis sa prison d'Istanbul.En Italie, les partis politiques ont annulé les manifestations prévues pour la fin de la campagne électorale pour les régionales des 3 et 4 avril, en signe de respect. Le maire de Rome, Walter Veltroni, a exprimé sa "grande douleur".
Des milliers de fidèles étaient massés en silence sur la place Saint-Pierre, à Rome, priant, certains en pleurs. A Milan, plus de 5.000 fidèles s'étaient réunis dans la cathédrale pour prier pour la santé de Jean Paul II.
A Jérusalem et Bethléem, les Palestiniens chrétiens suivaient les nouvelles avec angoisse. Jean Paul II avait été accueilli en sauveur le 22 mars 2000 par les réfugiés palestiniens du camp de Dheicheh, près de Bethléem, d'où il avait appelé à une aide internationale pour mettre fin à leurs souffrances.
Non seulement les catholiques mais toute la communauté internationale "vivent des heures tristes", a estimé la vice-présidente du gouvernement espagnol Maria Teresa Fernandez de la Vega, exprimant la solidarité de son gouvernement.
Qu'ils émanent de religieux ou d'hommes d'Etat, de croyants ou de non croyants, les hommages se multiplient pour saluer le travail accompli par Jean Paul II pendant son pontificat.
"Exemple moral" pour le monde entier, selon le chef de l'Eglise catholique d'Angleterre et du Pays de Galles, Cormac Murphy-O'Connor. "Grand Européen" et "homme de paix" qui a contribué à faire de l'Europe "une terre réunifiée", selon le ministre français de l'Intérieur Dominique de Villepin.
En Russie, le Polonais Igor Kovalevski, secrétaire exécutif de la Conférence des évêques catholiques de Russie, a insisté sur "le rôle immense joué par le pape dans l'établissement de la démocratie dans les pays de l'Europe de l'Est et en Europe centrale".
Le président ukrainien Viktor Iouchtchenko, lui-même orthodoxe, s'est déclaré fier que "la vie du pape soit liée à l'Ukraine". Le pape a visité l'Ukraine en 2001 et y a célébré plusieurs messes, partiellement en ukrainien.
La Chine, qui n'entretient pas de relations avec le Vatican, a officiellement souhaité que le pape puisse se "rétablir rapidement".